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De nos jours, les cultes religieux ou le sacré ne sont plus uniquement célébrés dans un lieu précis. En effet, le sacré circule, se commente et se réinvente en ligne. Sur les réseaux sociaux, les croyances deviennent victimes des contenus qui font polémique. Cette transformation bouleverse profondément la façon dont les individus communiquent le religieux.

Entre spiritualité et réseaux sociaux

Un geste machinal, passif est suffisant pour tomber sur une scène d’un genre nouveau : un jeune prêcheur, parfaitement éclairé par une « ring light » qui prie en direct face à des milliers d’internautes. Dans le fil des commentaires, les « Amen », « Mashallah » et émojis priants défilent sans arrêt. Ce qui se déroulait autrefois, dans une église ou une mosquée, prend désormais vie dans un espace conçu pour divertir. 

 

De la chaire aux algorithmes

Pendant longtemps, la parole spirituelle passait par des structures établies comme les lieux de culte, les figures religieuses reconnues et les textes officiels. Aujourd’hui, l’autorité se déplace. De jeunes connectés, des croyants charismatiques ou des prêtres numériques se présentent comme de nouvelles voix spirituelles. Sur YouTube, leurs chaînes comptent des millions d’abonnés et sur TikTok une vidéo peut devenir virale en l’espace de quelques heures. La légitimité ne repose donc plus uniquement sur le statut religieux, mais sur la capacité à retenir l’attention. L’algorithme devient alors la nouvelle chaire.

 

Capsules spirituelles et livestreams 

Les réseaux sociaux n’ont pas seulement reconfiguré le sujet abordé mais aussi la façon de parler. Les longs prêches cèdent la place à des formats courts et rythmés : témoignages personnels, messages inspirants pour commencer la journée, versets partagés en stories. La pandémie de la COVID-19 a préparé le terrain de cette évolution à travers des plateformes de communications comme Zoom où se déroulent en direct des messes et des prières collectives. Ces pratiques nées de la contrainte se sont enracinées. Ainsi aujourd’hui, une célébration religieuse peut être célébrée sans même franchir le pas de sa maison.

 

Une ritualité rétablie

Cette transposition numérique recadre la pratique. Pour beaucoup, elle permet une proximité inédite : les barrières géographiques se détruisent, des communautés transnationales se forment, et des personnes éloignées des institutions trouvent enfin un espace d’expression. Cependant, cette proximité cache ses revers : le silence sacré se voit remplacé par le bourdonnement des notifications. Ainsi, la prière devient à la fois intime et publique, vécue en direct et mise en scène.

 

 

La foi comme contenu

Sur les plateformes, tout finit par obéir aux lois de la visibilité. Sermons découpés en clips percutants, débats interreligieux diffusés comme des matchs d’idées, mots-dièse spirituels (#SpiritualTok, #DailyVerse) : la foi devient contenu et mise en forme pour exister. Certains prédicateurs construisent une véritable marque spirituelle esthétique, accompagnée de slogans.

Une modernité religieuse inattendue

Contrairement aux prédictions d’une modernité déstabilisante, le numérique n’efface pas le sacré : il le reformule. Il redistribue l’autorité tout en redéfinissant les rituels. Il expose la foi à la logique de l’attention et de la viralité. Pour les croyants comme les non-croyants, ce phénomène pousse à repenser le rapport à une dimension aussi essentielle que l’humanité.

 

En conclusion, étant croyants ou pas, il devient évident que la façon de vivre et de transmettre le sacré se métamorphose. Les lieux de culte classiques cohabitent désormais avec des vidéos, des forums et des flux numériques donnant naissance à de nouvelles formes de communauté et de partage. 

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