Thémis, vêtue d’une robe éthérée, émane une grâce à la fois sereine et majestueuse. Son regard délicatement voilé la libère des préjugés et des influences, lui permettant de rechercher la vérité avec précision et impartialité. Suspendue de sa main, la balance oscille entre le bien ou le mal, pesant soigneusement chaque action. Dans son autre main, elle brandit une épée tranchante, prête à fortement trancher les disputes et à rétablir l’équilibre. Bien que sage, son jugement est ferme et sa vérité inébranlable.
Thémis était la déesse grecque de la justice. Dans un parallélisme fascinant, la transformation de cette déesse de la mythologie en un symbole du système judiciaire reflète le développement de la définition de la justice.
La justice : au sens traditionnel du terme
L’idée de la justice, puissante et sacralisée par les sociétés humaines depuis des millénaires, est une valeur universelle que nous pensons tous comprendre, mais qui peut être interprétée de différentes manières selon les cultures, les époques et les individus.
En effet, la justice résiste à toute tentative de définition complète et exhaustive, car elle est intimement liée à la subjectivité, à la sensibilité et à la conscience de chacun. Sa définition est aussi changeante que la société qui la façonne, et elle évolue au fil du temps en fonction des valeurs et des croyances qui l'animent. Pour certains, la justice est la punition implacable des coupables, pour d'autres, elle est une réparation pour les victimes, et pour d'autres encore, elle est la réconciliation entre les parties en conflit.
Dans les temps anciens, la justice était souvent associée à la vengeance et à la réciprocité. Dans le code de Hammurabi, la loi du talion, couramment connue pour ce verset « œil pour œil, dent pour dent », stipulait que la punition devait être proportionnelle au crime commis. La justice était simplement une forme de rétribution équitable.
Plus tard, durant l’Antiquité grecque, les liens entre la justice et le divin étaient très étroits. Thémis était gardienne de l’ordre cosmique et social. Sa balance existait pour peser les cœurs et les âmes. Son rôle était de veiller à la conformité des actions humaines à l’ordre moral supérieur.
La justice et le juridique : des nuances méconnues
Au fil du temps, la notion de justice est devenue presque exclusivement confondue avec le juridique. Elle s'est raffinée et développée pour inclure des principes tels que l'égalité devant la loi, la protection des Droits de l'homme et la recherche du bien commun. Les systèmes juridiques modernes reposent sur des fondements plus complexes, tels que la séparation des pouvoirs, le respect des droits fondamentaux et le droit à un procès équitable.
En effet, de nos jours, la justice est à la fois un idéal philosophique, une activité et une institution. D’après le ministère français de la Justice, son rôle est de préserver la vie en société et elle assure trois missions : protéger les plus vulnérables, juger les conflits et sanctionner les comportements interdits.
Parallèlement, l’image de Thémis s’est éloignée du mystique et a été adoptée dans le contexte juridique au fil des siècles. Connue en anglais sous le nom de « Lady Justice », elle est devenue un emblème de la justice dans de nombreuses cultures, notamment dans le droit romain et les traditions juridiques modernes.
Un trône prestigieux, une chute inexorable ?
Aujourd'hui, la déesse Thémis n’est qu’un souvenir oublié, mais la justice garde sa place importante dans nos vies.
Malgré les différentes opinions sur la définition exacte de la justice, il y a d'habitude un consensus général sur sa vitalité pour l’humanité. D’après Platon, la justice est la vertu maîtresse, celle qui ordonne toutes les autres. Et selon John Rawls, la justice était la « première vertu des institutions sociales », celle dont l'objet était « la structure de base de la société ».
Mais, et si la justice n’assure pas ses missions ? Serait-il temps de changer sa définition ou plutôt de travailler pour que le rêve devienne réalité ?
Malheureusement, tout au nom de la justice, notre histoire récente a été marquée par la corruption, la moquerie du droit, l’irrespect de la dignité humaine et la mythomanie politique aussi flagrante qu’elle est éhontée. Les injustices permanentes ont éveillé un sentiment collectif de questionnement sur la réalité de cette valeur fondatrice de l’humanité.
Ainsi, il faudrait se rappeler que la justice n’est pas le droit et que les lois ne sont pas des testaments sacrés – surtout lorsqu’elles ne servent que ses législateurs. La véritable justice reste un idéal à atteindre, un horizon à poursuivre, une quête incessante de vérité et d'équité. Il est important de ne pas assumer la perfection du présent et de continuer à réfléchir et à débattre sur la signification de la justice pour assurer son respect et son application juste dans nos sociétés contemporaines et nos systèmes juridiques.
Pourrions-nous un jour forger une nouvelle épée intègre pour que la balance penche de nouveau vers la justice ?