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Retour sur les évènements : les Libanais et la soif inassouvie de culture

En ces temps de crises multiples, les Libanais ont plus que jamais besoin d’une bouée de sauvetage à laquelle s’accrocher. Que leur reste-t-il sinon la culture ?  Ils sont pleinement conscients de son importance, et j’ai pu le constater en participant en tant que bénévole à la deuxième édition du Festival International et Francophone du Livre, organisé par l’Institut français du Liban. Cette contribution « sur place » au festival, m’a permis de réaffirmer le besoin indispensable de garder la scène culturelle libanaise en vie.

Un public divers et disposé

Les parents désorientés cherchaient l’ «espace jeunesse », tenant par la main un enfant impatient. Les groupes de jeunes se renseignaient à propos des kiosques de vente des livres, les écoliers venaient avec leurs maitresses, et les plus âgés guettaient les tables rondes, catalogue entre les bras. Le campus de l’ESA, tout le long du Grand-Weekend, du 7 au 8 octobre, était quasiment plein. 

De bon matin, l’après-midi, et même le soir, les gens continuaient à déferler, certains visages étaient même devenus familiers. J’ai remarqué les mêmes personnes assister à diverses expositions, conférences, etc. Les gens ont donc tenu à bien se renseigner sur tout ce que propose le festival, et ont essayé d’assister aux plus d’évènements possibles.

Notre grande surprise a été de voir débarquer un énorme bus de touristes guidés par des Libanais, le jeudi 5, au concert dessiné organisé au Musée Sursock. Ils n’avaient aucune idée de ce qui se passait, mais ils ont tenu à descendre assister au concert, attirés par la foule, la musique, et les lumières.

Ce qui était beau à voir, c’était ce public éclectique, multiforme, réuni. À une seule conférence, on pouvait remarquer professeurs, étudiants et parents écouter avec le même intérêt. La scène culturelle manque à tous les Libanais. Tout le monde, au Liban, a besoin d’une échappatoire. De plus, le Festival a reçu beaucoup d’auteurs et d’artistes Libanais, connus ou pas, pour mettre en lumière les talents du pays. Ainsi, non seulement le public Libanais est disposé à se cultiver, mais il possède une génération qui a beaucoup à offrir et à dire.

 

Une jeunesse investie

Aujourd'hui, on affirme automatiquement que « plus personne ne lit ». On est rapide à fustiger cette nouvelle jeunesse « TikTok » qui ne tient plus de livres entre les mains. Et si moi-même je penchais vers ces affirmations hâtées, cette expérience au Festival m’a redonné de l’espoir. Partout, des enfants qui lisent. 

Partout, des jeunes avides de lectures, de rencontres, d’histoires. Ils passaient du temps sur les kiosques, à chercher des titres qui les attiraient. Ceux qui finissaient de lire allaient dessiner sur la fresque, ou écouter la lecture d’un conte. Leurs conversations étaient riches, intelligentes, et leur concentration irréprochable. Quelque part en eux, les enfants eux aussi valorisent ces évènements culturels, auxquels ils n’assistent pas tous les jours.  Les Libanais sont un peuple qui ne déçoit pas en culture, et ceci est en cours de transmission aux générations futures.

 

Et à part le Festival du Livre ?

De semblables observations peuvent être effectuées au Salon International du Livre, qui s’est aussi tenu en octobre 2023. Cette fois, il a rassemblé les Libanais francophones et non francophones. C’est dire que peu importe la langue parlée, ils seront toujours au rendez-vous, prêt à se promener entre les livres et oublier leur quotidien en crise, l’espace d’une journée. Le  Beirut Art Film Festival qui a pris place en novembre 2023 a également réuni les cinéphiles libanais. Les étudiants en audio-visuel à l’Université Saint-Joseph étaient aussi impliqués dans l’événement.

Toutefois, ces rencontres culturelles sont malheureusement devenues un « privilège » pour une majorité des classes libanaises, bien que gratuits pour la plupart. Nous sommes arrivés à un stade où les préoccupations de survie ne laissent plus ni le temps ni l’énergie au peuple Libanais de « se soucier de culture ». Celle-ci se révèle pourtant être nécessaire et salvatrice en temps de crise.

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