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Arendt au centre du Cogito

Le 20 juin 2025, le club Cogito a organisé une table ronde intitulée « Hannah Arendt : une penseuse du politique pour notre temps ». Philosophe juive ayant fui le nazisme, sa pensée est essentielle pour comprendre les événements de notre temps.

Antoine Abi Daoud, chargé de cours à l’USJ, affirme que selon Arendt, sans l’espace public, le politique ne peut pas exister. Inversement, sans la politique, qui est l’activité la plus humaine, le monde ne peut pas subsister. Le drame de la perte du monde mène à une vie zoologique, ce qui constitue l’un des plus grands crimes. Comme le dit Abi Daoud, Arendt affirme que le racisme a toujours existé. Le problème apparaît lorsque le racisme devient une idéologie. Ainsi, le concept biologique qu’est la race est introduit dans le champ politique. Ceci est problématique dans la sphère de la contingence qu’est la politique. Par la suite, l’autre est réduit à un barbare, à un étranger. Le concept de race a permis de légitimer les plus grosses atrocités, par refus de l’égalité originelle dans la pluralité. De ce fait, le monde n’est pas simplement une population, mais, comme le dit Abi Daoud, un lieu où toute vie possible est rendue impossible.

Tony Najjar, étudiant en philosophie, rappelle que, pour Arendt, une petite action peut aboutir à des conséquences catastrophiques. Ainsi, l’acte et la parole doivent aller de pair pour le bien-être de la pluralité. Le pardon rend possible la réhabilitation, comme la promesse permet de mieux affronter les incertitudes. Néanmoins, comme l’affirme l’étudiant, le pardon n’implique pas l’amnésie des crimes contre l’humanité, à l’image des événements contemporains. Inspirée par Kant, Arendt suppose que le jugement politique est nécessaire dans la pluralité. Or, pour Arendt, l’idéologie totalitaire est vide de jugement politique, et l’espace public disparaît.

Une résistance à ce manque de jugement peut apparaître grâce à l’autonomie et à la dignité humaine. 

Comme l’indique Nour El Bacha, étudiante en philosophie, Adolf Eichmann ne faisait qu’obéir aux lois, d’où le concept de la banalité du mal chez Arendt. Or pour l’étudiante, Eichmann pouvait choisir de se séparer du mal. Il pouvait utiliser sa faculté de juger au lieu de rompre avec elle.
Enfin, Maria Asmar, étudiante en psychologie, montre comment Arendt voit dans l’œuvre d’art le politique. La culture et la politique vont de pair, car elles requièrent le jugement et le dialogue. Le monde est pleinement humain grâce aux œuvres d’art. La destruction implique la destruction de l’humanité et de la culture et, dans une moindre mesure, de la condition humaine. Ainsi, la création devient un acte de résistance contre le totalitarisme. 

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