Si les slogans de sororité et les hashtags féministes garnissent nos réseaux sociaux chaque 8 mars, c'est bien pour « célébrer » la fête des femmes. Cependant, cette atmosphère festive se heurte à une réalité qui demeure bien moins joviale. Les statistiques de féminicides dans le monde qui plaident contre cet optimisme ont malheureusement beaucoup moins à célébrer : en France 2021, une femme meurt tous les trois jours sous les coups de son conjoint… Que célèbre-t-on donc exactement ?
Une lutte historique et actuelle
Pour mieux comprendre la véritable signification de cette journée mondiale des femmes, un petit rappel historique s’impose. Elle est pour la première fois célébrée le 19 mars 1911, par l’Internationale Socialiste des Femmes (ISF), et brandit plusieurs revendications : le droit de vote, le droit au travail, etc. C’est seulement en se penchant sur ce parcours pénible que nous pouvons prendre conscience de la perpétuité de cette lutte. Alors, la superficialité de ces hashtags que l’on voit jaillir le temps d’une journée puis disparaître aussitôt le lendemain en devient d’autant plus poignante. Attirer l’attention sur une cause juste est, bien entendu, une chose souhaitable. Cependant, rappelons-nous qu’un tel combat se doit d’être mené au jour le jour. A quoi bon célébrer la femme si ce n’est que le temps d’un 8 mars ?
Une responsabilité collective
La gravité de ce sujet s’étend bien au-delà des bouquets que l’on offre, de nos « mères, sœurs, et filles » que l’on célèbre sans pourtant écouter. Le soutien médiatique ne substitue pas l’imminence d’un effort concret et ancré dans une réalité locale. Voilà pourquoi nous vous proposons quelques conseils :
Ce qui se passe « derrière les murs » des autres vous concerne lorsqu’il s’agit d’une vie humaine en danger. Cette cause ne concerne pas uniquement les femmes, nous tenons tous une part de responsabilité. Rappelez-vous qu’un témoin passif est un complice.
Les horribles éloges de la prostitution
Au sein de toutes ces festivités médiatiques, la gravité des faits perd de plus en plus sa tangibilité, au point où l’on remarque récemment un phénomène inquiétant : l’éloge de la prostitution. En cette journée des droits de la femme, et sous le slogan “Your body your choice” (Ton corps, ton choix), de plus en plus de gens disculpent la prostitution des maux qu’elle inflige aux femmes, en laissant entendre qu’une prostituée choisit librement de l’être.
Mais si cela peut être vrai dans certains cas, ce n’est certainement pas la norme. Il ne faut pas parler de « libération sexuelle » mais bien d’exploitation de la femme, les chiffres parlent d’eux-mêmes : selon les statistiques issus de Prostitution and Traficking in Nine Countries, sur un pourcentage de 854 personnes interrogées, 64% des violences subies par des personnes prostituées constituent une menace avec arme, 73% témoignent d’agression physique et 57% de viol.
« Certaines le font par choix; elle, ne l'a jamais eu », phrase poignante et réaliste que l’on retrouve dans la chanson Salope du duo de rap français Bigflo et Oli. Les deux frères mettent en lumière cet aspect de la prostitution beaucoup moins glorifié et abordé dans les médias. Ils soulignent qu’une fille de joie laisse « ses rêves s'abîmer à quelques rues », comme « sacrifices pour un meilleur avenir ». Et ce n’est pas un milieu de travail confortable qui les attend mais bien un espace vicieux, duquel elles ne sont pas toujours sûres de revenir vivantes la nuit.
Un problème systémique
Nous avons mentionné plus haut quelques conseils à suivre pour venir en aide à une femme victime de violence ou simplement d’insécurité. Cependant, nous l’admettons bien, cela n’empêchera pas ces violences de se reproduire, simplement car le problème du sexisme est systémique. Il émane de la structure patriarcale de nos sociétés, et renverser un tel ordre n’est pas facile et ne se fera certainement pas à coups de hashtags.
Il est impératif de continuer la lutte, la vraie. Elle consiste à se mobiliser dans les rues pour forcer nos gouvernements à passer les bonnes lois ou à bloquer les mauvaises, à se révolter dès qu’une femme est harcelée, exploitée, voire tuée au sein de son propre foyer. Ces femmes ne sont pas des statistiques et des nombres. Ces femmes-là sont vos voisines, vos amies, vos collègues. Il suffit d’un geste, d’une parole, d’un appel, pour éviter l’irréversible.