1- Jamais le secret médical n’a été autant écorné. Il faut insister à ce que partout et en tout moment, on ne puisse savoir publiquement ou divulguer publiquement quelle personne est infectée. Une maladie même transmissible et même à haut degré de transmission demeure une maladie. Respecter l’anonymat est un fondement. Jamais des noms ne doivent circuler, encore moins dans la presse. Cependant vu les conditions de transmission, et au regard de la loi libanaise, on peut encourager à ce que les soignants qui ont approché une personne ayant eu un test positif, que la personne testée positive elle-même mette au courant les personnes qu’elle a côtoyées et le cas échéant, de dire dans un service qu’il y avait des personnes testées positives sans divulguer leurs noms. Si une personne détectée positive refuse de divulguer et de se confiner en quarantaine, une levée du secret médical est autorisée par la loi. En contexte de pandémie, le refus de soin de la part du patient devrait s’effacer au nom de la solidarité puisque l’effet d’un tel acte serait de favoriser la propagation de la maladie.
2- Le triage des malades. Le CCNE en France propose des cellules éthiques de soutien. Un comité d’éthique ou des « experts en éthique » ne doivent pas se substituer aux médecins qui doivent décider finalement eux-mêmes des priorités. Les médecins peuvent être désemparés, surtout en ces moments. Il appartient aux comités d’éthique locaux d’être disponibles pour aider à la décision. Mais cela dans un contexte particulier qui ne devrait pas devenir général et surtout ne pas se substituer carrément à la décision du médecin. Un plan décisionnel doit se préciser au niveau des équipes s’occupant des personnes malades, au niveau des urgences et de la réanimation.
3- Le libre choix du médecin. Cela fait partie des libertés fondamentales. Il faut la préserver le plus possible. Toute personne a le droit de choisir son propre médecin. Soigner n’est pas seulement bien connaître les recommandations d’une maladie. Il y a aussi l’alchimie entre le malade et le soignant pour que le traitement réussisse. Et cela demeure un droit essentiel dans la mesure du possible. Il est vrai que dans le contexte actuel, au regard de la situation sanitaire du pays, certains patients peuvent être orientés vers certains hôpitaux et certains médecins en particulier.
4- Les soignants ne peuvent se dérober à leur tâche d’être présents, voire omniprésents, en cette période de crise. Certes, leur risque de contamination existe. Il fait partie des risques du métier. Non seulement leur présence est requise, mais une présence bienveillante et surtout en apaisant les craintes des autres, des malades et des potentiels malades. Il appartient aux soignants de le faire. Ils ne peuvent le faire s’ils sont rongés par leur propre angoisse. Il faut que tous les soignants fassent attention à leur propre bien être-psychique autant que de se préserver de l’infection. Une cellule d’écoute et de soutien pour eux et les patients doit rester toujours opérationnelle.
5- Le droit d’accès aux soins de toute personne doit être préservé, voire même renforcé dans les moments actuels de pandémie. Toutes les considérations financières qui peuvent limiter l’égalité d’accès aux soins de tout le monde doivent s’estomper au profit d’une prise en charge optimale de toute personne en demande de soins.
6- Il existe un devoir de solidarité. Dans une institution hospitalière et autour d’elle, il y a une multitude d’engagements professionnels pour la plupart et d’engagements bénévoles pour certains. L’accent devrait être mis sur la nécessaire solidarité entre tous, sur la disponibilité de ceux qui ne sont pas en première ligne pour rendre d’autres services. On doit pouvoir compter sur une grande disponibilité des services d’aumônerie ou d’accompagnement spirituel, que celui-ci soit musulman, chrétien ou non religieux. Ces personnes accompagneront les malades et leurs familles, les écouteront, les apaiseront et les réconforteront et ceci par leur seule présence.
7- Il est important d’éviter la stigmatisation des patients infectés et des soignants qui travaillent avec eux. Ceux qui ont accepté librement de soigner ces malades méritent estime et considération. Il appartient aux autres soignants et aux administratifs de ne jamais leur démonter un abandon, un rejet ou une stigmatisation lors de leur rencontre avec eux.
8. Les recherches sur les différents déterminants de la pandémie doivent être encouragées. Toutefois, en présence d’un contexte d’urgence, il appartient aux comités d’éthique de rester vigilants sur les recommandations à suivre en matière de respect des critères de la recherche comme en dehors des périodes d’urgence.