En 1724, le siège vacant du patriarcat grec (en arabe rūm) d’Antioche fait l’objet
d’une double élection, celle de Cyrille Ṭānās et celle de Sylvestre al-Qubruṣī.
Contrairement aux précédentes compétitions entre candidats au patriarcat, celle-ci
aboutit à la création de deux Églises séparées, catholique et orthodoxe.
Ce résultat est l’aboutissement de la fragmentation interne de la communauté rūm,
combinée à une ouverture sans précédent sur l’Église de Rome et sur l’Église de
Constantinople, dans un contexte global de fort affrontement confessionnel entre
catholiques, orthodoxes et protestants. Les factions locales ont à leur disposition
des ressources financières, des soutiens politiques, et un arsenal argumentaire sans
précédent, qui les aident à construire deux Églises distinctes, à travers un certain
nombre de marqueurs de différenciation. Ce processus de construction d’identités
confessionnelles distinctes et opposées s’est étalé sur un temps long, jusqu’au milieu
du XIXe siècle au moins.
À l’occasion du troisième centenaire de la rupture de 1724, cet ouvrage collectif
contribue à renouveler la compréhension de l’événement à partir de nouvelles
sources et de nouvelles approches. Il invite aussi à adopter la bonne distance par
rapport au passé, afin de faciliter le dialogue contemporain nécessaire entre clergés
et fidèles des deux Églises.