La bonne gouvernance dans les partis politiques ; législations actuelles et requises

Jeudi 7 novembre 2023
Collaborateurs
  • Konrad-Adenauer-Stiftung (KAS)


Dans le cadre du programme académique du Forum de la bonne gouvernance, l'Observatoire de la fonction publique et de la bonne gouvernance (OFP) de l'Université Saint-Joseph de Beyrouth (USJ), en coopération avec la Fondation Konrad Adenauer - Programme État de Droit au Moyen-Orient et Afrique du Nord, a organisé un séminaire intitulé « La bonne gouvernance dans les partis politiques ; législations actuelles et requises », en présence du Pr Salim Daccache s.j., recteur de l’USJ, le député George Okais, l'ancien ministre Me Ziad Baroud, le Pr Pascal Monin, directeur de l’OFP, le directeur de la Fondation Konrad Adenauer, M. Philippe Bremer, représenté par l'avocat Paul Saadeh, le professeur Shawkat Echtay, professeur d'université, la directrice du programme de participation politique des femmes de l’ONU, Yara Nassar, et le professeur associé à la Faculté de droit et de sciences politiques de l’USJ, Rizk Zgheib.  

La nécessité de développer les législations nécessaires

Le coup d’envoi du séminaire a été donné par le professeur Pascal Monin, qui a remercié Konrad Adenauer pour son soutien et sa participation. « Nous travaillons, précise-t-il, dans des moments difficiles mais nous sommes pleins d'espoir que le Liban sortira de sa crise et retrouvera une vie politique normale. » Monin a souligné que la situation actuelle ne se poursuivra pas indéfiniment, révélant que les partis au Liban vivent presque sans loi, puisque celle qui régit la création des partis est la loi ottomane sur les associations promulguée en 1909, et cela seul indique la profondeur du problème et la nécessité de développer les législations nécessaires. « Les Libanais, dit-il, ont émis, dans leur majorité, des jugements catégoriques sur la majorité des partis, les tenant pour responsables d’une grande partie de ce que nous vivons actuellement et de l’effondrement du pays. »

Le directeur de l’OFP a noté que le public a le droit de savoir pourquoi les partis n'apportent pas le changement promis dans leurs programmes électoraux, quelles sont les sources du problème dans ces partis et comment et par qui sont-ils financés ? Et de poser les questions suivantes : Quels effets les interventions étrangères ont-elles sur l’action des partis politiques ? Où en sont-ils en termes de diversité confessionnelle et de genre ? Comment concilier le besoin de législation et la garantie de la liberté des partis au Liban ?

De son côté, Me Paul Saadeh a prononcé un discours au nom de Philippe Bremer, dans lequel il a souligné que les partis politiques constituent l'un des piliers des systèmes démocratiques, voire leur pilier le plus important. « Le problème dont souffrent les partis politiques, poursuit-il, est qu'ils ne sont soumis à aucune législation claire, en plus de l'absence de tout organe de contrôle de leur travail. Est-il raisonnable que les partis politiques continuent à être traités comme des associations soumises à la loi sur les associations ottomanes publiée en 1909, qui comprend 19 articles ? »

Quant au Pr Salim Daccache, il a révélé que les partis politiques du monde entier ont aujourd'hui du mal à vivre les mutations, à l'ère des changements rapides, sans que cela ne les empêche de recourir à l'opportunisme. « Les Libanais d’aujourd’hui, ajoute-t-il, ont davantage soif de rencontres et d’échanges sur une base contractuelle pour une communauté de destin et d’intérêts communs, et non de différences irréconciliables avec des origines lointaines et des affiliations primaires. »

« Les partis ont maintenu une relation forte avec l'identité religieuse, ce qui signifie davantage de manipulation et de domination communautaire. C'est l'un des plus grands problèmes de la vie politique libanaise car c'est une source de corruption et de déviation de la pratique politique », a conclu le Pr Daccache.

L’ancien ministre Ziad Baroud a qualifié la loi de 1909 de bonne car c'est une loi libérale, expliquant ses avantages et ses inconvénients, et soulignant la nécessité de la développer, notamment la clause qui concerne les obligations financières des partis, exigeant plus de transparence et réclamant qu’ils doivent respecter la loi existante avant de la développer. Baroud a noté que les partis constituent une nécessité fondamentale pour la société si leurs pratiques sont conformes à la loi de 1909.

Le séminaire était animé par le Pr Rizk Zgheib qui a évoqué la transformation du Liban après 1990 d’un État de partis à un État contrôlé par les partis.

Le sectarisme : un obstacle fondamental à la croissance de la vie politique

Le député George Okais a révélé que le sectarisme est un obstacle fondamental à la croissance de la vie politique déclarant la nécessité d'adopter une nouvelle loi, tout en tenant compte de la liberté qui caractérise le Liban. Il a également souligné qu’un parti doit croire à l'État de droit et à la constitution, sans quoi il ne devrait pas être qualifié ainsi.

Le professeur Shawkat Echtay a souligné, pour sa part, que la question principale est la capacité des partis au Liban à parvenir à une bonne gouvernance et comment la mettre en œuvre. « Les partis politiques, précise Echtay, sont directement responsables des crises économiques, financières, sanitaires, de subsistance et autres au Liban ; ils n’ont pas révisé leurs démarches et leur identité de parti pour identifier leurs erreurs. »

Quant à Yara Nassar, elle a confirmé que le rôle des femmes au sein des partis est encore très loin de ce qu'il devrait être, ajoutant que le nombre de candidates des partis pour les élections de 2022 n’a pas dépassé 12 femmes, ce qui signifie que la structure des partis n'est pas adaptée pour permettre aux femmes d'accéder aux suffrages. Nassar a souligné que la présence des femmes est un élément de bonne gouvernance et que l'étendue de leur présence au sein du parti signifie l'amplitude de la pratique démocratique de celui-ci.

La directrice administrative de l'Institut pour le droit allemand et international des partis et la recherche sur les partis à l'Université Heinrich-Heine de Düsseldorf, le Dr. Heike Martin, a prononcé un discours via l'application « Zoom », dans lequel elle a parlé de l'expérience des partis en Allemagne et de la bonne gouvernance.

Pour clôturer le séminaire, une discussion avec les participants a eu lieu. Les intervenants ont convenu à l'unanimité de la nécessité de développer la loi sur les associations ottomanes publiée en 1909. Un document de travail sera publié et précisera les étapes nécessaires pour parvenir à une bonne gouvernance au sein des partis. L'Observatoire organisera également des séminaires ultérieurs sur le même sujet en 2024.

Consultez les coupures de presse
Lire aussi : Good Governance in Political Parties: Current and Necessary Legislation