En souvenir du Doyen Richard Chemaly, la Faculté de droit et des sciences politiques (FDSP) a organisé un colloque sur les droits des déposants à l’épreuve de la crise financière.
Lors de la séance d’ouverture, le doyen Léna Gannagé a rappelé que ce colloque est d’abord l’occasion de rendre hommage à un homme, le Doyen Richard Chemaly, dont le nom est indéfectiblement associé à l’histoire de la Faculté.
« Richard Chemaly nous a quittés le 27 décembre 2020 à un moment où l’épidémie du Covid empêchait d’honorer sa mémoire comme nous l’aurions voulu. Beaucoup de témoignages et d’hommages lui ont été rendus dans la presse après sa disparition. Mais c’est ici, au milieu des siens, dans sa deuxième famille, parmi ses anciens étudiants, ses collègues, ses amis, ses confrères, les membres de l’administration qui ont travaillé à ses côtés, en présence du recteur de l’Université, que la Faculté, a voulu lui rendre hommage. L’idée voulue par nous tous était que la première manifestation officielle qui suivrait sa disparition, le premier retour au débat académique après presque trois années d’interruption lui soit offert, pour que la vie ne reprenne pas ici, chez lui, sans commencer par évoquer son souvenir (…)
Les institutions s’attachent aux femmes et aux hommes dans lesquels elles se reconnaissent, ceux qui reflètent au mieux ce qu’elles ont pour ambition de représenter. Si Richard Chemaly aura été un représentant merveilleux de la Faculté de droit c’est parce qu’il incarnait cette symbiose étroite des qualités scientifiques et éthiques, qui faisait toute sa singularité. Parce que l’étendue de sa science, de son savoir, de son talent. était portée par sa rigueur morale et l’intransigeance de son intégrité. De là lui venait sans doute son autorité naturelle, une autorité, au sens noble du terme, en ce sens qu’il avait, de l’avis de tous, une stature intellectuelle et morale qui forçait le respect ».
De son côté, le recteur de l’Université Saint-Joseph, le Professeur Salim Daccache, a évoqué le doyen Chemaly en ces termes : « Richard Chemaly, le juriste accompli, l’intrépide conseiller juridique des recteurs de l’USJ, le cerveau et la mémoire juridique éclairée et libre, toujours prêt à servir, qui ne cherche pas les compliments, le témoin qui a marqué des générations, qui a gardé la réputation d’excellence de la FDSP durant les années les plus sombres, a été rattrapé par la crise. Cette situation de malheur, révèle le recteur, le faisait souffrir plus que ses douleurs du corps. Car il voyait un Liban des libertés s’éteindre de par les erreurs monumentales commises dans la gestion politique et économique du pays ».
Le thème choisi pour rendre hommage au Doyen Chemaly s’inscrit dans le cadre d’un programme de manifestations intitulé « Résister, repenser, reconstruire : l’université face à la crise ». Ce programme, précise Léna Gannagé, « est né de l’urgence pour l’université de mobiliser ses forces vives pour prendre part au débat public, à un moment où l’effondrement que connait le pays a considérablement réduit les espaces d’échanges et de réflexion ».
« La question des droits des déposants », rappelle le doyen de la FDSP, « s’est imposée avec la force de l’évidence. Et s’il paraissait essentiel de l’envisager dans une faculté de droit, c’est parce que la violence de la crise économique et financière qui frappe le Liban est considérablement amplifiée par l’état de non-droit dans lequel elle se déploie. »
« Jamais, ajoute-t-elle, comme depuis le début de l’effondrement, le délabrement des institutions étatiques libanaises ne s’est révélé de manière aussi violente, aussi généralisée, aussi dramatique. A tous les échelons de l’Etat, l’irresponsabilité, la démission, les conflits d’intérêts qui gangrènent les organes de prise de décisions, ont conduit à mettre de côté les préoccupations juridiques, au sens premier du terme, c’est-à-dire la nécessité de réguler les intérêts en présence : ceux des déposants, des banques, de la Banque centrale, et ceux de l’Etat libanais, avec comme préoccupation principale, le bien commun. L’inertie assumée du Parlement libanais sur des questions essentielles, comme l’adoption d’un Plan de redressement, répartissant équitablement le montant des pertes, ou l’élaboration d’une législation relative au contrôle des capitaux, a laissé durablement les libanais sans protection face à la crise. »
Dans l’amphithéâtre Gulbenkian plein à craquer, ce colloque a rassemblé pour la première fois depuis le début de la crise, dans un cadre universitaire, des intervenants de sensibilité très différente : banquiers, avocats, universitaires, représentants de la société civile et acteurs de la vie politique.
Le premier panel intitulé : « Les banques libanaises sont-elles en cessation de payement ? » réunissait autour de l’ancienne ministre de la Justice Marie-Claude Najm, le Professeur Antoine Eid, ainsi que MM. Riad Obégi (PDG de la Banque BEMO) et Jean Riachi (PDG FFA Private Bank). Le deuxième panel, modéré par le directeur de l’Institut des sciences politique de l’USJ, Karim Bitar, était consacré au plan de négociations avec le FMI. Il réunissait M. Saadé Chami, vice-premier ministre et président de la délégation libanaise auprès du FMI, et Alain Bifani, économiste et président de la Fondation Citoyenne.
Le dernier panel était consacré aux questions sensibles relatives au secret bancaire et au contrôle des capitaux. Présidé par l’ancien ministre de l’Intérieur Ziyad Baroud, il était animé par Maître Karim Daher, avocat fiscaliste et président de l’ALDIC et par Maître Antoine Merheb avocat à la Cour et conseil juridique en droit bancaire.
Signe du succès de cette manifestation et du besoin du public de débattre en toute sérénité, les discussions se sont prolongées dans l’amphithéâtre Gulbenkian jusqu’en début de soirée.
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Mot du Pr Salim Daccache s.j., Recteur de l'USJ
كلمة البروفسور سليم دكّاش اليسوعيّ، رئيس جامعة القديس يوسف