Dans le cadre du partenariat avec l’Université de Montréal, l’enseignante Julie Masse a intervenu auprès des étudiants et des enseignants de l’IET dans le domaine de la santé physique elle a pris part à l’élaboration du module et partagé son expertise tant au niveau scientifique que pédagogique. Dans cette entrevue, elle nous raconte l’expérience de son passage au Liban.
Professeur, pourriez-vous commencer par vous présentez ?
Je m’appelle Julie Masse, je suis ergothérapeute et professeure agrégée de clinique à l’École de réadaptation de l’Université de Montréal depuis 2009. J’ai obtenu mon baccalauréat en ergothérapie de l’Université de Montréal en 2000 et j’ai poursuivi ma maîtrise en sciences de la réadaptation de l’Université McGill. Dans ma pratique, j’interviens surtout auprès d’adultes présentant des problèmes musculosquelettiques liés au travail, en clinique libérale, en centre de réadaptation ainsi qu’en clinique de la douleur. C’est vraiment cette clientèle-là qui a suscité mon intérêt : ces personnes se plaignent d’une douleur importante qui prend tellement de place dans leur vie jusqu’à affecter leur équilibre de vie. En parlant d’équilibre, j’essaye dans mon quotidien d’équilibrer entre la pratique en clinique, l’enseignement, mais aussi la recherche en m’engageant dans des projets à l’échelle nationale et internationale. Actuellement, mes travaux de recherche s’attardent sur l’intervention ergothérapique en gestion de la douleur persistante selon une perspective occupationnelle et à l’impact de la diversité culturelle sur la pratique de l’ergothérapie.
Comment êtes-vous parvenu à l’IET sachant que vous êtes installée à Montréal ?
La directrice du programme d’ergothérapie ainsi que le responsable pédagogique à l’Université de Montréal m’ont contacté pour m’informer de ce partenariat avec l’Université Saint-joseph de Beyrouth. Je n’ai pas du tout hésité à me lancer dans cette aventure. J’avais d’ailleurs pris part précédemment à d’autres projets de collaboration dans d’autres coins du monde et je trouve que c’est ce genre d’expérience qui nous font sortir de notre zone de confort et nous enrichisse le plus.
On a débuté par travailler avec l’équipe de l’IET à distance et puis, toujours dans le cadre de ce partenariat, je me suis rendue à Beyrouth où j’ai surtout pris part au développement du module de santé physique. J’ai donc travaillé en équipe avec les enseignants de l’IET pour mettre en place le contenu des cours, dont je peux citer l’activité thérapeutique graduée et la rééducation sensitive parmi tant d’autres.
Parlez-nous un peu de votre passage au Liban
Malgré mon implication depuis 2018, je n’ai pu me rendre à Beyrouth qu’en mars 2021 pour une durée de deux semaines. J’admire l’organisation impeccable de ce séjour, dès mon arrivé on a tout de suite pu se mettre au travail et profiter au maximum du temps passé à l’IET.
Bien que l’équipe et moi avons œuvré pendant une bonne période à distance, le fait de se réunir face à face a créé un sentiment d’appartenance. J’ai adoré la dynamique qui s’est créée à travers les interactions et les réflexions de groupes, on a vraiment pu avancer dans le projet.
De plus, le fait d’être « dans le bain », d’être immergée dans le contexte libanais m’a vraiment aidé à apprécier sa culture propre pour l’intégrer dans le travail. Le contenu des cours et des vignettes cliniques doit répondre au contexte de pratique réel libanais. Le fait d’avoir vécu ces quelques jours ici m’a permis d’être plus ambitieuse, d’apprécier la pratique actuelle tout en détectant les domaines en émergence qu’il serait pertinent d’inclure dans le programme.
J’ai aussi eu la chance d’interagir avec les étudiants, que je souligne très ambitieux. Voir cette communauté d’ergothérapeutes se former est une vraie source de motivation pour continuer à améliorer et à développer ce bagage pédagogique qu’ils emmèneront avec eux dans leur pratique professionnelle.
Quelle est votre vision future de l’ergothérapie au Liban ? précisément l’IET ?
Selon mon expérience, l’ergothérapie est une profession en pleine expansion, qui va probablement continuer à se diversifier de plus en plus par rapport aux populations prouvant profiter de ses services. Il serait pertinent dans le futur de chercher à intervenir auprès de populations encore peu exploitées au Liban, par exemple auprès des accidents de travail. Cette vision s’applique également aux contextes de pratiques en promouvant la profession de plus en plus au Liban. N’ayez pas peur d’aller là où aucun ergothérapeute n’a encore mi les pieds. Je pense qu’avec une meilleure couverture par les caisses nationales et les systèmes d’assurance, les soins en ergothérapie serraient plus accessibles à la population ce qui ouvrira plus d’opportunités pour la profession.
Un autre point que j’aimerai souligner est l’importance de soutenir la pratique des cliniciens et cela grâce à des formations continues. Cela permettra de définir l’identité professionnelle, savoir ce que j’ai à offrir en tant qu’ergothérapeute et de quoi j’ai besoin pour offrir mes services. Ces formations permettent aussi de rester à jour : les données probantes évoluent vite et c’est important de suivre les nouveautés pour offrir les meilleurs soins possibles à nos patients. A l’IET, les enseignants revisitent chaque année les cours pour les mettre à jour, mais une fois le diplôme en main ce sera la responsabilité du clinicien de rester informé. J’invite donc les étudiants à développer ce « reflexe de recherche », d’aller lire dans la littérature, de s’inscrire à des formations quand l’opportunité se présente afin de soutenir la pratique professionnelle.