Le programme propose des cours sur les différentes religions du Moyen-Orient, sur le dialogue interreligieux mais également sur le Liban avant, pendant et après la guerre, l’impact de l’expérience humanitaire au Moyen-Orient, notamment au pays du Cèdre, ou encore la religion, la démocratie et les droits de l’homme. Photo USJ
In L'Orient Le-Jour par Micheline Abi Khalil, le jeudi 20 janvier 2022
Dans le cadre du projet Caravane de l’Ordre de Malte, des volontaires étrangers, en mission au Liban auprès des personnes handicapées, apprennent à la faculté des sciences religieuses de l’Université Saint-Joseph à mieux comprendre la complexité socioreligieuse du contexte dans lequel ils interviennent.
« Gratifiante. » C’est ainsi que Gaultier d’Abadie, un Français de 22 ans, Pia Wladorf et Johannes Baldamus, deux Allemands de 19 ans, qualifient leur mission, voire service humanitaire, menée auprès de Libanais souffrant de handicaps physiques et mentaux dans les multiples institutions des Sœurs de la Croix. Fidèles aux valeurs et principes fondateurs de l’Ordre de Malte, notamment à sa fameuse devise « Tuitio Fidej et Obsequium Pauperum » (« Porter, témoigner, protéger la foi et servir les pauvres et les malades »), ces trois volontaires du groupe Caravane, logés dans un appartement à Naccache, ont, tour à tour, exprimé lors d’une rencontre via Zoom leur « reconnaissance » et « appréciation » de ce séjour qui leur a permis de s’enrichir à plus d’un niveau. Ainsi, ils ont pu découvrir ce qu’est le « vivre-ensemble », apprendre l’amour, l’altruisme et la générosité, et connaître le bonheur de voir s’épanouir un sourire sur le visage et dans le regard d’une personne fragile trop souvent délaissée, de créer des liens et de nouer des amitiés pour la vie. Et surtout d’appréhender la mosaïque socioreligieuse du pays et sa réalité pluricommunautaire grâce à la formation qu’ils suivent à la faculté des sciences religieuses de l’Université Saint-Joseph (USJ).
Lancé il y a environ douze ans par l’Ordre de Malte à la suite d’une initiative de la jeunesse allemande de l’ordre, le projet Caravane, perturbé ces deux dernières années en raison de la pandémie, permet, comme le résume Oumayma Farah, responsable de la communication de l’ordre, à de jeunes catholiques étrangers, issus de plusieurs pays européens, de consacrer environ un an de leur vie à encadrer des Libanais souffrant de handicaps, les « invités » comme ils les appellent, de soulager leur souffrance et d’adoucir leur quotidien en leur apportant joie, amour, soutien affectif et moral. Selon ses termes, cet engagement se poursuit bien au-delà du Liban, jusque dans les pays d’origine des volontaires, où les anciens de Caravane endossent le rôle d’ambassadeurs officieux, partageant leur expérience exceptionnelle à l’étranger et engendrant ainsi une dynamique internationale.
Au cours magistral s’ajoutent aussi des excursions aux principaux sites historiques du Liban afin de permettre aux volontaires de découvrir les multiples facettes du pays et de s’imprégner de sa culture. Photo Ordre de Malte Liban
Une introduction à la complexité du Liban
En réelle immersion, ces jeunes venus à la découverte de « l’autre différent » rentrent chez eux au terme de l’année sabbatique passée au Liban, riches d’une expérience humaine et spirituelle formatrice faite de rencontres et de partage au sein des camps de vacances ou des centres sociomédicaux où ils opèrent. Une expérience consolidée et fortifiée par les séminaires et la formation offerte en collaboration avec la faculté des sciences religieuses de l’USJ.
Étalée sur deux semestres, cette formation taillée sur mesure, en fonction de l’emploi du temps du groupe Caravane, inclut entre autres, pour l’année en cours, une introduction à l’histoire du Liban, au dialogue interreligieux ainsi qu’aux différents aspects des religions chrétienne, musulmane (sunnisme, chiisme et druze) et juive au Moyen-Orient et leur influence sur le politique, le social et l’économique. Destiné par ailleurs à compléter l’expérience des bénévoles en mobilité et à les accompagner dans cette rencontre interculturelle, le programme, comme l’explique la Dr Lara Iskandar Hawat, coordinatrice du programme Caravane à la faculté des sciences religieuses de l’USJ, leur accorde l’opportunité « d’entrer dans la perspective du pays et la logique du contexte » en leur livrant des clés de lecture de cette région fort complexe. C’est pourquoi il propose également des cours sur le Liban avant, pendant et après la guerre, le christianisme oriental, l’impact de l’expérience humanitaire au Moyen-Orient, notamment au pays du Cèdre, ou encore la religion, la démocratie et les droits de l’homme. Au cours magistral, s’ajoutent aussi des excursions dans les principaux sites historiques du Liban afin de permettre aux volontaires de découvrir les multiples facettes du pays et de s’imprégner de sa culture.
Dispensé en anglais, le cursus mis au point pour les Caravanistes à l’USJ a débuté en 2010 avec la signature d’un partenariat entre la faculté des sciences religieuses de l’USJ et l’Ordre de Malte, « lorsque la première promotion Caravane a reçu son certificat en étude des réalités historiques et religieuses du Proche-Orient », précise la Dr Hawat.
Donner pour recevoir
« C’est en se donnant que l’on reçoit, c’est en s’oubliant que l’on se retrouve soi-même. » Les bénévoles l’ont certes bien compris. Les autres aussi. « L’autre jour, une directrice de l’un des centres des Sœurs de la Croix m’a confié que fournir des vêtements chauds ou assurer des médicaments, tout le monde peut le faire. Mais être présent, servir l’autre et savoir donner, peu le savent », avance Lélia el-Khazen Mallat, responsable du Pôle social de l’Ordre de Malte Liban. « Si je dis ça, c’est pour vous montrer l’importance que revêt cette action humanitaire auprès de ces personnes vulnérables », a-t-elle conclu.