Le père Gabriel Khayralla ainsi que les étudiantes de lettres françaises du Campus Liban-Nord de l’USJ ont eu l’occasion d’accueillir l’autreure libanaise et l’avocate à la cour Lina Zakhour, dans le cadre de la matière Femmes et Littérature en Méditerranée.
Son roman qui s’intitule Imane, foi en français, était le noyau du débat. C’est l’histoire d’une jeune Libanaise dont le futur est extrêmement dépendant de son pays parce qu’elle est chrétienne et tombe amoureuse d’un musulman. Mais Imane a tellement élargi son champ des possibles en se permettant de vivre cette histoire d’amour. Puisqu’elle vit dans le monde arabe où la religion est très prégnante, on se demande tout au long du livre : l’aime-t-il vraiment jusqu’à combattre la société pour sauver leur amour ?
Imane croit en la vie et vit conformément à ses croyances. Elle n’accepte pas qu’on lui impose des convictions. C’est une femme rebelle qui a le courage d’aller avec un homme en laissant tomber son confort et les règles des communautés religieuses. Bref, elle refuse que la société lui dicte ce qui est possible.
Les traditions et les coutumes sont au cœur de ce roman. La société libanaise y est tellement ancrée qu’il est difficile de s’en séparer. Mais Imane tente de prendre en main son destin, et cela à sa propre façon. Cette réunion a permis donc de soulever des thèmes assez importants et qui sont toujours d’actualité tels que la définition du mariage, la résignation des femmes et leurs rôles de transmettre la misogynie à leurs enfants, le rôle de l’éducation dans l’affranchissement des anciennes traditions archaïques et la nécessité de lutter contre toutes formes d’injustice sociale et de despotisme.
Dans un pays où la littérature féministe n’est pas très présente, Lina Zakhour lève le voile sur les règles qui pèsent sur les femmes au Liban. D’où l’importance de la littérature dans l’ébranlement des tabous des sociétés traditionnelles. Le roman révèle aussi l’aspiration des femmes à vouloir vivre à leur guise au XXIe siècle alors que leur destin leur échappe des mains. Avec sa plume, l’auteure excelle dans la description des personnages et de leurs états psychiques.
Selon l’autrice, malgré le développement du monde, on remarque parfois la présence des victimes de l’ignorance et des préjugés ancrés depuis longtemps dans l’inconscient collectif de notre génération actuelle. Le roman fait écho avec la nouvelle Warda Al Hani de Khalil Gibran qui trace l’histoire d’une jeune femme qui, par authenticité, quitte son mari riche pour rejoindre son amant. Warda Al Hani et Imane ont décidé d’être des objecteurs de conscience en dénonçant les esprits rétrogrades qu’elles confrontent.
La question qui se pose enfin est la suivante : jusqu’à quelle mesure une femme et même un homme peuvent vivre leurs propres convictions dans un pays comme le Liban où tout est codé par la famille, la religion et les conventions sociales ?