Descendante d’une famille d’émigrés napolitains, idole qui inspira La Callas ainsi que de nombreux artistes lyriques, la soprano italo-américaine se réfugiait dans sa petite bulle. Dès son plus jeune âge, ses rigides cordes vocales lui concoctent une carrière hors norme. Elle faisait partie de la chorale de l’Église où on remarqua la diurne beauté de sa voix, et où elle prenait ses tous premiers cours de chants auprès d’un organiste dont on ignore toujours l’identité. Ses parents, propriétaires d’une boulangerie, n’éprouvent aucune compassion envers la musique. Toutefois, ce n’est pas la mer à boire. Reconnue en tant qu’une des meilleures cantatrices du XXe siècle, Rosa Maria Ponzillo se retrouve bien accueillie dans les bras des États-Unis le 22 Janvier 1897. En fait, c’est à travers sa sœur Carmela – jeune mezzo-soprano de 18 ans voulant tenter sa chance dans des théâtres – que la soprano pioche son parcours musical. Le duo Ponzillo se produit au « Café Malone » de New Haven, où elles chantent des airs d’Opéra. C’est alors que l’américaine décroche des leçons auprès de « William Thorner ». En 1918, le baryton français « Victor Morel » l’introduit au fameux Enrico Caruso qui, ému par sa voix, la présente à Gatti Casazza – directeur du Metropolitan Opera – qui l’embauche pour la première de « La Forza Del Destino » de Verdi le 15 Novembre 1918 – aux côtés du ténor italien – dans le rôle de Leonora, lui marmonnant à l’oreille : « C’est la première fois que j’engage une artiste américaine sans qu’elle ait fait ses preuves en Europe ». Cinq mois plus tard, elle opte pour Ponselle comme nom de scène. On raconte que cette dernière souffrait d’un trac de malade, au point qu’on l’apercevait tourner en rond durant des heures devant le Metropolitan avant qu’elle ne se décide d’entrer ! Touchée par le vermicelle verdien, elle s’unit à Luisa Miller, Violeta Valery, Elizabeth de Valois, Aïda et Elvira en se mettant dans leur peau, justifiant les confettis de son alentour en 1930. Sur ce s’ajoute la garniture de ce répertoire trois ans plus tard avec des compositeurs plus tardifs tels que Mascagni, Montemezzi, et Ponchielli. Néanmoins, pourquoi ne pas se retourner vers Puccini ou Wagner ? Pas si audacieuse que ça… En effet, elle demandait fréquemment que ses rôles soient transposés à de plus basses tonalités. Serait-ce à cause de son trac ? De la peur de l’échec ? Pourquoi évitait-elle les aigus ?
À l’instar des rôles verdiens, elle n’eut la chance d’incarner qu’un seul rôle mozartien, celui de Donna Anna. Cependant, la malédiction bizetienne s’abat sur la cantatrice avec Carmen qui concrétise son naufrage en 1935. De surcroît, le départ de Gatti Casazza du Metropolitan en Mai 1935 complique la situation de Ponselle du fait qu’elle fut repoussée de la part de la nouvelle direction qui ne voulait absolument pas lui accorder le rôle d’Adriana Lecouvreur. Irascible nouvelle, elle démissionne du Metropolitan Opera et tire sa dernière révérence au public le 17 Avril 1937 avec une autre Carmen à Cleveland. Quelques mois plus tard, elle épouse le fils du maire de Baltimore et se retire dans sa « Villa Pace » qui demeure aujourd’hui le « Musée Rosa Ponselle ». Malheureusement, le bonheur ne dura pas si tant que ça : en 1950 elle divorce, mais sacrifie le reste de sa vie à l’enseignement du chant classique jusqu’en 1974. Parmi ses élèves figure Plàcido Domingo, célèbre ténor espagnol.
Dix-neuf saisons de triomphe au Metropolitan Opera et un répertoire de 23 rôles différents se pointent comme préambule d’une carrière sinusoïdale. Bref, trois ans ayant suivi le décès de la cantatrice, soit en 1984, la fondation Rosa Ponselle destinée à aider les jeunes chanteurs voit le jour. Or, l’effroyable fin de cette Carmen serait-elle liée à un coup de couteau autoritaire ?