La quasi-totalité des libanais ne peuvent évoquer leur enfance sans mentionner les fameuses bottes sucrées multicolores dont ils ne se lassaient jamais. Rien que d’en parler ravive de vieux souvenirs : tous ces enfants, quoique turbulents, se pressaient de bien se tenir pour plaire à leurs parents et décrocher le gros lot.
Si les friandises adorées des petits diffèrent d’un pays à un autre, les différentes teintes colorées, elles, font l’unanimité dans l’univers des sucreries. Dans cet amalgame de couleurs, vous trouverez entre autres l’une des plus vieille confiserie de France : le berlingot de Carpentras.
L’histoire du berlingot de Carpentras est encombrée de légendes. L’une d’elle – la plus répandue – raconte qu'il aurait été confectionné pour la première fois au Moyen Âge, à base de caramel, sous le pontificat de Bertrand de Got – Clément V, premier pape d’Avignon – par Sylvestre, un de ses cuisiniers.
Le véritable berlingot est rouge et à la menthe : c’était un produit médicinal marchandé par les apothicaires pour se rafraîchir l’haleine et masquer le goût amer des préparations médicinales.
Ce n’est qu’au XIXe siècle qu’est créé sous les mains du pâtissier François-Pascal Long le premier berlingot moderne à Carpentras. Grâce au sucre produit en France, la confiserie (l’artisanat de conserver les fruits qui mûrissent) a rapidement évolué. C’est pourquoi il aurait eu l'idée d'utiliser le sirop des fruits confits qu'il fait cuire et de décorer la pâte avec un sucre opaque blanchi longuement cuit et battu. La pâte est ensuite découpée encore chaude pour lui donner cette forme remarquable de tétraèdre translucide tigré.
Chaque confiseur dispose d’une recette secrète authentique – souvent familiale – perpétuant cette tradition artisanale qui requiert un savoir-faire et une dextérité unique, de la cuisson jusqu’à l’emballage.
Quant au débatteurs de l’étymologie du « berlingot », ils sont loin de s’entendre : nul ne sait réellement s’il s’agit d’un remaniement du nom du pape Bertrand de Got, d’évolution du provençal berlingau/berleng signifiant respectivement osselet/jeu de dés, ou encore d’une déformation de l’italien Berlingozzo signifiant galette ou gâteau fait sur la table.
En tout cas, les Berlingots de Carpentras ont bien voyagé en Europe, délectant les papilles des petits et des grands. Malheureusement, seulement deux artisans luttent aujourd’hui contre l’effacement de ces lingots sucrés : Thierry Vial (Confiserie du Mont-Ventoux) et Serge Clavel (Confiserie de Carpentras).